Dernière modification de l’article le 21 juin 2016 par Admin
Le neuromarketing ou comment la publicité se met aux sciences cognitives. Comment les publicitaires utilisent la connaissance du cerveau ?
Notre cerveau choisit-il sans demander notre avis ? Quelle est véritablement la part consciente de nos décisions ? Contrôlons-nous vraiment notre comportement ou les mécanismes inconscients à l’œuvre dans notre tête s’en chargent-ils pour nous ? Ces questions passionnent les chercheurs depuis des décennies et c’est aujourd’hui au tour des agences de publicité de s’y intéresser et de faire émerger une nouvelle discipline, le neuromarketing [1].
Les premières études relevant de ce domaine remontent aux années 1990 et ont été menée à l’université de Harvard. Les chercheurs cherchaient alors à démontrer jusqu’à quel point nos raisonnements et prises de décision se faisaient de manière consciente. A leur grande surprise, ils ont constaté que 90 à 95% d’entre eux étaient inconscients. On sait aujourd’hui que le cerveau est capable de traiter simultanément des milliers d’informations. Or, seule une très faible quantité d’entre elles atteint notre conscience et il s’agit le plus souvent des informations et décisions jugées les plus importantes.
Cette sélection des informations était autrefois indispensable à notre survie puisqu’elle permettait de prendre instantanément des décisions face à un danger imminent : vaut-il mieux rester sur place, se battre ou s’enfuir ? Les mécanismes inconscients qui étaient alors à l’œuvre sont encore présents aujourd’hui et continuent de manipuler notre volonté. De plus, les informations qui arrivent à notre conscience sont déjà légèrement influencées par nos émotions ainsi que par nos expériences précédentes. Les experts du cerveau humain ont ainsi démontré que les réactions émotionnelles à une stimulation sont nettement plus rapides que celles après raisonnement.
Il existe une expérience intéressante qui consiste à remplir des bouteilles de marques différentes avec exactement la même boisson. On constate alors que les personnes invitées à comparer ces boissons vont automatiquement juger que la plus savoureuse d’entre elles se trouve dans la bouteille de la marque la plus prestigieuse, indépendamment du fait qu’ils ont bu exactement le même liquide. De tels phénomènes intéressent les entreprises de la publicité qui se mettent aujourd’hui à travailler de plus en plus fréquemment en collaboration avec des chercheurs en sciences cognitives, en neuropsychologie et en neuromarketing afin d’adapter leurs campagnes publicitaires. Elles s’interrogent par exemple sur la question de savoir si nous faisons nos courses au supermarché en tout état de conscience ou si notre « pilote automatique interne » entre en jeu.
En Slovaquie, l’intérêt pour le neuromarketing est très récent, les premières expériences ont été faites au cours des cinq dernières années. D’après Miroslav Svec, chercheur en neurologie de l’entreprise DICIO Marketing [2], « les agences de publicités slovaques ont recours au neuromarketing uniquement lorsque d’importantes difficultés apparaissent au niveau des ventes.»
Les journalistes du magazine slovaque SME sont allés à la rencontre de M. Svec dans les locaux de DICIO Marketing et décrivent les expériences qui s’y tiennent. Voici des extraits choisis de leur reportage : De l’extérieur, on dirait un appartement ordinaire mais cette impression se dissipe dès que la porte s’entre-ouvre : quelques ordinateurs, des câbles électriques à même le sol et dans la bibliothèque des livres sur la neuropsychologie et le marketing.
Michaela est la première des deux personnes participant à l’expérience. Devant elle se trouve un écran sur lequel sera simulé un trajet en voiture. L’équipe de DICIO commence par lui attacher un petit appareil au bout des doigts. Il servira à enregistrer sa température corporelle. Puis on lui accroche les « boucles d’oreille », des capteurs de potentiel électrique. Aussitôt après, on lui met sur la tête quelque chose comme un bonnet de bain, recouvert de dix-neuf électrodes et de câbles argentés reliés aux ordinateurs de l’équipe. Ces électrodes relèveront son activité cérébrale et permettront de tracer son encéphalogramme, la réponse électrique de son cerveau aux stimuli.
Des courbes, représentant chacune différentes régions du cerveau, oscillent sur les écrans des deux ordinateurs de l’équipe. Lorsque soudain, elles s’agitent dans tous les sens, c’est quelques instants seulement avant que la personne interrogée ne se mette à parler. Elle allume la caméra qui va surveiller ses yeux et sur l’écran d’ordinateur placé devant elle, des images commencent à apparaitre petit à petit. Des chiffres et des lettres défilent au centre de l’écran. Lorsqu’ils apparaissent en rouge, Michaela doit cliquer avec le bouton gauche de la souris. Pendant ce temps, des publicités apparaissent à droite et à gauche de l’écran.
L’objectif des chercheurs au cours de cette expérience sur le neuromarketing est de déterminer le nombre de publicités dont la personne se souvient et de qualifier la qualité de ce souvenir. Il s’agit de conclure s’il est plus intéressant de placer les affiches publicitaires du côté gauche ou du côté droit de la route. En s’intéressant à l’activité du cerveau et non aux réponses de la personne à un sondage classique, on obtient des informations sur sa décision véritable, sans déformation de la vérité. Or, les résultats de cette expérience ont montré que l’on se souvient mieux des textes et des images lorsqu’elles sont placées du côté gauche et des logos lorsqu’ils sont placés du côté droit.
– [1] Article d’encyclopédie – Neuromarketing (FR)
– [2] Site de l’entreprise DICIO Marketing (SK)
Texte: Chloé Mugler
Origine:Ambassade de France en Slovaquie / ADIT – http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/71059.htm